Technique

Les mains courantes : des exigences à garder sous la main

Paul Demers
Chroniqueur technique

La main courante est un élément important pour accéder ou évacuer un bâtiment ou une partie de celui-ci. Un peu comme un rail ferroviaire, elle agit comme un guide et offre un bon appui qui contribue à diminuer les risques de chute lors de l’utilisation des escaliers, des rampes et même tout au long des issues incluant certains corridors.

Il est important de bien définir l’endroit spécifique où seront installées la ou les mains courantes pour être conforme aux exigences et selon le Code de construction du Québec Ch. 1 (2015), les mains courantes doivent répondre à des critères d’ergonomie, de hauteur, de continuité, de quantité, de solidité et de dégagement si elles sont exigées et en tout temps, elles sont soumises à une règle d’empiètement. Au fil des lignes qui suivent, nous détaillons les exigences concernant ce fil conducteur qu’est la main courante.

L’endroit d’installation

article mains courantes tournantes

Plusieurs facteurs influencent l’installation d’une main courante selon l’endroit où elle se trouvera. De ces facteurs, on trouve le nombre de personnes pouvant occuper le bâtiment, l’usage du bâtiment, une partie de bâtiment considérée comme une issue ou comme un parcours sans obstacles voué à des usagers avec mobilité réduite requérant des modalités adaptées pour assurer leur sécurité en tout temps. L’analyse de ces emplacements peut devoir considérer quelques-uns de ces facteurs créant une forme de réaction en chaîne.

Par exemple, pour l’évacuation d’une salle de spectacle (Usage A1), un grand nombre de personnes auraient à emprunter un escalier qui pourrait être d’une grande largeur obligeant l’installation de mains courantes de chaque côté, mais aussi dans l’espace central pour rediviser en quelques corridors le parcours d’évacuation.

À consulter au Code selon l’endroit requis :

  • Si dans une issue : Articles 3.4.3.3., 3.4.6.5., 3.4.6.9., 3.4.6.10. et 3.4.7.6.
  • Si dans un parcours sans obstacle : Article 3.8.3.5.
  • Si liée à un grand bâtiment : Articles 3.3.1.14. et selon l’usage 3.3.2.10. (Établissements de réunion), 3.3.4.7. (Habitations)
  • Si liée à une maison ou petit bâtiment : Sous-section 9.8.7.

À noter : Un parcours sans obstacle exige qu’un accès sans obstacle (fauteuil roulant) soit prévu non seulement pour se rendre aux suites ou aux pièces mentionnées, mais à l’intérieur même des suites ou des pièces, sauf dans certains cas. Un accès sans obstacle est obligatoire, notamment :

  • À l’intérieur des chambres des hôpitaux et des maisons de repos avec traitements;
  • À l’intérieur des aires réservées aux services ou ayant un usage général, y compris les aires communes, des buanderies d’habitations, les aires d’activités de loisir, les cafétérias, les salons, les salles à manger et les infirmeries;
  • Et autres (voir 3.8.2.3. et A-3.8.2.3.).

La solidité (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5.14)., 9.8.7.7.)

De grandes tensions peuvent être appliquées à une main courante considérant sa longueur, l’affluence à certaines heures de pointe et l’effet panique en moment d’urgence. Règle générale pour les mains courantes d’issues dans les grands bâtiments (4 étages et plus et/ou plus de 600 m² de superficie), on se réfère à l’article 4.1.5.14. pour le calcul des charges auxquelles elles peuvent être soumises.

Pour les petits bâtiments (3 étages et moins et 600 m² de superficie ou moins), on stipule les points suivants :

  • Résister à une charge concentrée (point unique) d’au moins 0,9 KN en tout point et applicable en toute direction.
  • Résister à une charge uniforme (tout au long) d’au moins 0,7 kN (sauf si elle dessert un seul logement).

La fixation des mains courantes sur des éléments structuraux en bois et desservant un seul logement ou une maison incluant un logement accessoire, est réputée conforme si :

  • Les points de fixation sont espacés d’au plus 1,2 m (3’11 ¼’’) horizontalement.
  • Les points de fixation aux extrémités sont à une distance maximale de 300 mm (11 7/8’’) du bout.
  • Les points de fixation comprennent au moins deux vis de grosseur #8 pénétrant d’au moins 32 mm (1 ¼’’) dans le bois massif.

Note : kN est une unité de mesure qui signifie Kilonewton. Kilo pour 1 000 et newton pour une force appliquée sur un objet. Pour obtenir des newtons, il faut multiplier une masse (kilogramme) par l’accélération gravitationnelle de l’endroit où se trouve cette masse. Donc, sachant que l’accélération gravitationnelle moyenne sur la terre est de 9,80665 m/s2 (que nous arrondirons à 9,81 m/s2), nous pouvons multiplier une masse (kg) par 9,81 m/s2 et obtenir des newtons. Une masse de 100 kg multipliée par 9,81 m/s2 donnera 981 N sur la terre. En comparaison, la même masse sur la lune appliquera une force 162,2 N puisque l’accélération gravitationnelle sur la lune est de 1,622 m/s2.

La hauteur (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5., 3.8.3.5., 9.8.7.4.)

Imaginez-vous être le concepteur d’un escalier voué à être installé dans un bâtiment où on retrouverait le temple de la renommée du basket-ball, des boutiques de clientèles multiples et une aire de garderie pour enfants. Pour préciser le contexte, le plus grand joueur à avoir évolué dans la ligue de basket-ball NBA est Gheorghe Muresan et il mesure 2,32 m (7’ 7’’). En comparaison avec la relève de notre société, les enfants qui ont leur vulnérabilité, on peut facilement admettre que les extrêmes sont parfois difficiles à faire cohabiter.

Tout d’abord, la hauteur se mesure verticalement du dessus de la main courante jusqu’à une ligne d’axe ou simplement appelée ligne de référence, alignée sur tous les nez de marche d’un escalier ou selon le cas, sur le plancher d’une rampe, d’un palier ou d’un corridor.

En contexte d’accessibilité, antérieurement appelé parcours sans obstacles concernant les espaces conçus pour les personnes à mobilité réduite et particulièrement pour les fauteuils roulants, une main courante exigée dans une rampe doit être à une hauteur
d’au moins 865 mm (34’’) et d’au plus 965 mm (38’’) (voir art. 3.8.3.5.).
Pour les autres cas, en règle générale, pour un escalier, un palier ou une rampe, une main courante exigée doit avoir une hauteur de 865 mm (34’’) à 1070 mm (42’’).

  • Si en plus de la ou des mains courantes exigées au Code il y avait ajout d’une ou des mains courantes, celles-ci n’auraient pas à respecter les hauteurs prescrites pour celles exigées.
  • Pour un escalier hélicoïdal (colimaçon), la main courante portant vers le côté extérieur, doit avoir une hauteur d’au moins 1070 mm (voir art. 9.8.4.7.).
article mains courantes image escalier

L’ergonomie (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5.5). et 9.8.7.5.)

Précédemment, nous faisions un lien avec les écarts de grandeur entre personnes, mais les mains des personnes ont aussi de multiples formats selon l’âge, la corpulence et en plus la dextérité des gens peut être un facteur important à considérer et nous restreindre à une normalisation au bénéfice de la sécurité des utilisateurs.

article mains courantes mince et repliee

Toutes les mains courantes doivent être construites de manière à :

  • Offrir une bonne prise et être faciles à empoigner sur toute leur longueur.
  • Ne pas être dotées d’éléments tranchants ou abrasifs.
  • Si de forme circulaire, avoir au moins 30 mm (1 3/16’’) et au plus 43 mm (1 11/16’’) de diamètre.
  • Si de forme non circulaire, avoir au moins 100 mm (4’’) et au plus 125 mm (5’’) de périmètre et une section transversale dont la plus grande dimension est d’au plus 45 mm (1¾’’).
  • Si de forme émincée aux extrémités, elles doivent être repliées vers le mur, le plancher ou un poteau de manière à ne pas constituer un danger pour les personnes ayant une incapacité visuelle.

Le dégagement (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5.13). et 9.8.7.5.)

En plus de guider, les mains sont baladeuses et explorent par le sens du toucher les voies à emprunter qui s’offrent à nous. Aux abords des mains courantes, il faut donc qu’il y ait un espace raisonnable pour exercer cette mission exploratoire en plus de permettre de bien s’y tenir le cas échéant. Le dégagement entre les mains courantes et la surface située derrière elles doit être d’au moins :

  • 50 mm (2’’) si en présence de surface régulière ou lisse.
  • 60 mm (2 3/8’’) si en présence de surface rugueuse ou abrasive.
article mains courantes degagement

La continuité Voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5.10)., .9.8.7.2.)

article mains courantes escalier continuite

Pour des raisons de sécurité, il est particulièrement important que les mains courantes puissent offrir une continuité pour guider les utilisateurs et leur servir d’appui tout au long et précisément aux extrémités des rampes, des volées d’escaliers ainsi qu’aux changements de direction par exemple, aux paliers et aux marches rayonnantes ou dansantes. Les personnes ayant une incapacité visuelle dépendent des mains courantes pour se guider dans les escaliers. Une main courante continue facilite la progression aux changements de direction des escaliers.

  • Règle générale au moins une main courante exigée doit être continue sur toute la longueur de l’escalier ou de la rampe, y compris aux paliers.

Exceptions

  • Une main courante exigée peut être interrompue face à une baie de porte.
  • Dans les escaliers desservant un seul logement ou une maison comportant un logement accessoire, les mains courantes exigées peuvent être interrompues aux paliers, mais être continues au long d’une volée incluant des marches rayonnantes.
article mains courantes non conforme

Main courante non conforme

Le nombre exigé (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5., 9.8.7.1.)

Le nombre de mains courantes dans un escalier ou une rampe est fonction du risque de chute des utilisateurs et est également influencé par les capacités physiques et les comportements multiples des utilisateurs. À ces facteurs de risques s’ajoutent la complexité des changements de direction aux paliers, les inclinaisons des rampes et volées d’escaliers et la largeur du parcours d’issue à emprunter. C’est pourquoi nous pouvons rencontrer des scénarios de 1 ou 2 mains courantes régulièrement et même plus selon la largeur de l’escalier ou de la rampe.

Dans les petits bâtiments :

  • Si l’escalier dessert un seul logement ou maison comportant un logement accessoire : 1 main courante requise.
  • Si escalier de volée droite est moins de 1100 mm (43 5/16’’) de large : 1 main courante requise.
  • Si escalier de volée tournante est moins de 1100 mm (43 5/16’’) de large : 2 mains courantes requises.
  • Si l’escalier a 1100 mm (43 5/16’’) ou plus de large (tous, droite ou tournante) : 2 mains courantes requises.
  • Si escalier hélicoïdal (colimaçon) : 2 mains courantes requises (voir 9.8.4.7.).
  • Si une rampe a moins de 1100 mm (43 5/16’’) de large et dessert un seul logement ou maison comportant un logement accessoire (droite ou tournante) : 1 main courante requise.
  • Si une rampe a 1100 mm (43 5/16’’) ou plus de large et dessert un seul logement ou maison comportant un logement accessoire (tous, droite ou tournante) : 2 mains courantes requises.
  • Si une rampe (droite ou tournante) dessert un autre endroit que de l’habitation : 2 mains courantes requises.
  • Si escalier extérieur comptant plus de trois contremarches et desservant un seul logement ou maison comportant un logement accessoire : 1 main courante requise.
  • Si l’escalier ou la rampe dessert un seul logement et :
    1. Si intérieur, main courante non requise si au plus deux contremarches.
    2. Si extérieur, main courante non requise si au plus trois contremarches.
    3. Pour une rampe, si la dénivellation ≤ 400 mm, main courante non requise.

Mains courantes intermédiaires

En présence d’escaliers plus larges que la largeur minimum exigée, les mains courantes exigées sont installées le long du présumé parcours naturel en provenance et à destination du bâtiment et au moins une main courante doit être située à au plus 750 mm de distance du côté créant un corridor naturel de circulation. Cela vise à faire en sorte que les mains courantes soient installées uniquement par rapport à la largeur exigée des issues, peu importe la largeur réelle de l’escalier ou de la rampe. Mais si l’escalier ou la rampe ne dessert pas plus de deux logements, cette règle peut ne pas s’appliquer (voir 9.8.7.1.2).).

Dans les grands bâtiments

Les grands bâtiments en général utilisent les recommandations citées pour les petits bâtiments à quelques détails près.

  • Les mains courantes situées dans les logements doivent satisfaire aux exigences pertinentes de la sous-section 9.8.7., comme pour les petits bâtiments (voir art. 3.3.4.7.).
  • Les escaliers de moins de 1100 mm de largeur doivent être munis de 1 main courante.
  • Une main courante doit être installée de chaque côté d’escaliers d’au moins 1100 mm de largeur.
  • Une main courante doit être installée de chaque côté de volées tournantes, peu importe la largeur.
  • Pour un escalier hélicoïdal (colimaçon) dans un logement : 2 mains courantes requises (voir art. 9.8.4.7.).
  • Il faut installer des mains courantes des deux côtés d’une rampe (voir art. 3.4.6.5.15).

Mains courantes intermédiaires

Dans une rampe ou un escalier, il doit y avoir une main courante intermédiaire distancée d’au plus 750 mm tout le long d’un parcours d’issue exigé et qu’au moins une partie sous forme de corridor ait la largeur minimale exigée mesurée entre deux mains courantes et que toutes les autres parties de l’escalier ou de la rampe entre deux mains courantes aient une largeur libre d’au moins 510 mm.

article mains courantes rampe intermediaire

Pour les mains courantes situées dans une salle de réunion ou de spectacle (Usage A) ayant des sièges fixes, quelques configurations pour le positionnement de mains courantes dans les allées comportant des marches sont possibles. Nous pouvons considérer en position centrale d’allée, la position en bout d’allée et en position latérale continue opposée à l’allée (voir Note A-3.3.2.10.).

L’empiètement (voir CCQ Ch. 1 (3.4.3.3., 3.4.6.10. et 9.8.7.6.)

article mains courantes palier

Comme pour les corridors et allées, la largeur des escaliers et des rampes est conçue en fonction de permettre une évacuation rapide et sécuritaire pour le nombre de personnes occupant les aires de bâtiment.

Une main courante et ses supports de fixation ne peuvent empiéter sur plus de 100 mm dans l’espace libre de la largeur minimale exigée pour ledit escalier, rampe ou issue horizontale.

Extrémité prolongée (voir CCQ Ch. 1 (3.4.6.5.12). et 9.8.7.3.)

On exige que les mains courantes soient installées de façon à ne pas faire obstacle au passage des piétons. À cette fin, on ne devrait pas prolonger les mains courantes dans un hall d’entrée, ce qui risquerait de réduire le dégagement prescrit. Si un escalier se termine dans une pièce ou dans un autre espace, on doit déterminer les schémas de circulation à ces endroits afin de s’assurer que tout prolongement de la main courante ne gênera pas la circulation des piétons.

Puisque le prolongement des mains courantes dans les logements n’est pas exigé (voir le paragraphe 9.8.7.3. 2)) et du fait que les occupants connaissent généralement bien la configuration des lieux, cette exigence ne devrait généralement pas avoir de répercussions sur la conception des logements.

On exige également que les extrémités des mains courantes ne présentent aucun danger pour les personnes ayant une incapacité visuelle, pour les enfants dont la tête peut être à la même hauteur que l’extrémité de la main courante ou pour des personnes portant des vêtements amples ou transportant des objets encombrants. Le moyen de réduire ces risques consiste à terminer les mains courantes sur les murs, les planchers ou les pilastres. Toutefois, cette précaution est inutile dans les logements dont la configuration des lieux est généralement bien connue des occupants.

Par exemple, si une main courante est fixée à un mur sans se prolonger au-delà de ce mur jusque dans l’entrée ou dans un autre espace, il est admis que cette installation offre un degré de sécurité raisonnable; d’autres moyens peuvent offrir une protection équivalente.

article mains courantes volee

Selon le Code

  • Les extrémités des mains courantes ne doivent ni nuire au passage des piétons ni présenter de danger ou de risque.
  • À l’exception des escaliers et des rampes desservant un seul logement ou une maison comportant un logement accessoire, y compris les aires communes, les escaliers et les rampes doivent avoir au moins une main courante latérale qui se prolonge horizontalement sur au moins 300 mm en haut et en bas de chaque volée ou rampe (voir la note A-9.8.7.3. 2)).
  • Pour les escaliers ou les rampes desservant un seul logement ou une maison comportant un logement accessoire, y compris les aires communes, la main courante peut commencer à partir d’un balustre ou d’une volute installée sur la marche du bas.

Conception initiale (voir CCQ Ch. 1 ([A] 2.2.1.1., et [A] 3.2.1.1.)

Initialement, un concepteur a la tâche de diriger l’élaboration d’un projet à construire en se guidant sur les objectifs qui touchent la sécurité, la santé, l’accessibilité, la protection contre l’incendie et les dommages structuraux en plus de l’environnement. S’ajoutent à cela les énoncés fonctionnels cités au Code national du bâtiment, Chapitre 1 – Bâtiment (2015). Pour les mains courantes :

Les objectifs de sécurité sont : OS3.1 – un faux pas, une chute, un contact physique, une noyade ou une collision.
OS3.7 – le retard ou l’impossibilité des personnes à se mettre à l’abri en cas d’urgence.
L’objectif d’accessibilité est :OA – Un objectif du CNB est de limiter la probabilité qu’en raison de la conception ou de construction du bâtiment, une personne ayant une incapacité physique ou sensorielle soit gênée de manière inacceptable dans l’accès ou l’utilisation du bâtiment ou de ses installations.
Les énoncés fonctionnels sont :F10 – Faciliter le déplacement rapide des personnes vers un lieu sûr en cas d’urgence.
F30 – Réduire au minimum le risque que des personnes subissent des blessures en raison d’un faux pas, d’une chute, d’un contact physique, d’une noyade ou d’une collision.
F73 – Faciliter l’accès au bâtiment et à ses installations, ainsi que la circulation à l’intérieur de ceux-ci, aux personnes ayant une incapacité physique ou sensorielle.