Juridique

Vice caché et vice de construction : deux poids, deux mesures

 

Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs(1) prévoit que la garantie d’un plan doit, notamment, couvrir les réparations des vices cachés(2) ,des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices de sols(3) découverts après la réception d’un bâtiment. Notons toutefois que ce règlement s’applique seulement dans le cas du manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment concerné. Êtes-vous en mesure de distinguer ce qui différencie ces deux types de vices ?

Le vice caché

Dans le règlement, la notion de vice caché est définie selon les articles 1726 et 2103 du Code civil du Québec(4) (C.c.Q.) qui indiquent que le vice caché est ce qui rend impropre le bien à l’usage auquel il est destiné ou en diminue tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté.

Selon la jurisprudence arbitrale(5) , quatre critères qualifient un vice caché :

  • Il doit posséder une certaine gravité
  • Il doit précéder la vente
  • Il doit être inconnu de l’acheteur
  • Il doit être occulte (c’est-à-dire non apparent).

Somme toute, on retiendra que le facteur clé est la perte d’usage grave. Dans un tel cas, s’il est dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable n’excédant pas six mois de sa découverte, le vice sera admissible à la couverture de garantie pour une période de trois ans, ce délai débutant à compter de la réception du bâtiment.

Le vice de conception, de construction ou de réalisation et des sols

La notion de vice de conception, de construction ou de réalisation et des sols, introduit quant à elle un concept prévu à l’article 2118 du Code civil du Québec.(6) , soit la perte de l’ouvrage.

Soulignons qu’il n’y a pas d’exigence à ce que le bâtiment s’écroule pour avoir droit à la protection puisque le concept de perte de l’ouvrage a une interprétation large. La présence d’un danger sérieux susceptible d’entraîner une perte potentielle, même partielle de l’ouvrage suffit(7) . C’est le risque de perte et non la survenance de celle-ci qui entraîne la couverture par le plan. La jurisprudence arbitrale tend aussi à considérer la possibilité d’un risque pour la santé des occupants comme un facteur aggravant permettant de donner ouverture à la couverture(8) .

Aussi, comme dans le cas du vice caché, la dénonciation doit être faite par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable n’excédant pas six mois de la découverte ou de la survenance du vice (ou de la première manifestation en cas de perte graduelle).

Il est important de noter la différence entre la couverture concernant le vice caché et celle concernant le vice de construction. La couverture du vice caché s’étend sur une durée de trois ans suivant la réception du bâtiment alors que celle du vice de construction s’étend sur une durée de cinq ans suivant la fin des travaux.

Saviez-vous que?
En cas d’insatisfaction d’une décision de l’administrateur, le bénéficiaire ou l’entrepreneur peuvent non seulement s’adresser à un tribunal d’arbitrage dans les 30 jours de la réception de la décision, mais peuvent aussi convenir de recourir à la médiation pour tenter d’en arriver à une entente sur le différend qui les oppose.

François-Olivier Godin est avocat à La garantie Qualité Habitation.

  1. RRQ, c B-1.1, r 8
  2. Articles 10(4) et 27(4) du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs
  3. Articles 10(5) et 27(5) du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs
  4. L.Q. 1991, ch. 64
  5. Voir notamment Habitations Meaujé et Syndicat Condominium Châtelets phase II, GAMM 073518
  6. Précité, note 4
  7. Syndicat de la copropriété des Habitations Henri-Deslongchamps et Gestion Giovanni Scalia Inc., GAMM 0506-8219
  8. SDC Jardins de Grenoble (3 683 432) et 9232-6941 Québec Inc. (Habitation Classique), CCAC S11-120903-NP