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Les écoquartiers : une nouvelle approche de vie de quartier

Association de la construction du Québec
Actualités de la construction

© Zibi
Les écoquartiers sont des milieux de vie à échelle humaine pourvus d’une éthique environnementale et sociale d’avant-garde. Aussi appelés quartiers verts, durables ou écoresponsables, leur esprit tire vers le haut les critères de protection des milieux naturels, de réduction des émissions de GES et de rendement énergétique. Leur définition exige des constructeurs le respect de pratiques innovantes. Regard sur ces collectivités viables qui contribuent à la vitalité des villes et des agglomérations dans lesquelles elles s’insèrent.

L’écoquartier est un concept qui n’est pas encore très répandu au Québec, souligne d’entrée de jeu Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville, un organisme sans but lucratif (OSBL) qui a lancé un guide éclairant et évolutif sur le sujet. Afin de mieux cerner les fondements de ces quartiers émergents, il explique que le phénomène est constitué de deux mouvances. « Une première réflexion exprime une tendance européenne, c’est-à-dire un comportement plus écoresponsable sur le plan du bâti et des attitudes de vie. En somme, des habitudes majoritairement ancrées dans une certaine culture et résolument en avance en matière d’écologie par rapport à l’Amérique du Nord. On le constate notamment dans l’efficacité soutenue du transport collectif en Europe. »

Ce sont les Allemands qui ont instauré la tendance il y a très longtemps, affirme-t-il. « Ce sont eux qui ont créé le label écoquartier. Les Français ont rapidement emboîté le pas à cet art de vivre, en plaçant l’écologie au centre de leur quotidien. Du côté de l’Amérique du Nord, l’équivalent de cet écosystème, sans être tout aussi exigeant sur le plan des attentes, se décline plutôt dans l’approche LEED Neighborhood, des pratiques davantage apparentées aux quartiers de type TOD (Transit Oriented Development). »

« L’écoquartier pour sa part désigne un environnement dont l’empreinte écologique observée, autant à travers le bâtiment que les comportements de ses résidents, est le plus limité possible. En ce sens, il représente une réponse mieux structurée de l’industrie immobilière face aux défis du développement durable. Bien qu’on en attende de plus en plus parler, il reste néanmoins difficile de désigner des lieux existants ou en développement qui en respectent toutes les conditions », estime Christian Savard, porte-parole de l’organisme engagé dans la promotion du développement de collectivités durables partout au Québec.

Enjeu et défi

Le premier grand défi des écoquartiers consiste à réunir dans un environnement de proximité une multitude de services destinés aux résidents. Du CPE aux supermarchés jusqu’aux lieux de travail. Cette qualité fondamentale permet de réduire considérablement les distances et le temps de déplacement, et ainsi encourager le transport actif, comme la marche ou l’utilisation d’une bicyclette. C’est également un milieu de vie qui favorise l’utilisation du transport collectif.

Ville fonctionnelle

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© Zibi

À cet égard, il vient s’inscrire dans une agglomération intégrant une gare d’autobus, de train ou de tramway à énergie propre et renouvelable. « Ce quartier qui stimule les comportements verts considèrera de plus l’emploi de voitures électriques, notamment offertes en autopartage. On trouvera dans ce village moderne toutes les caractéristiques d’une ville fonctionnelle, dont une école, des aires de jeux, des jardins communautaires et boisés, tel un poumon vert, où l’on peut se rendre à pied. Dans certains cas, des fermettes et des aires d’agricultures périurbaines biologiques, donc construites à l’orée, mais intégrées au concept, alimenteront les tables des maisonnées de produits frais et locaux », convient Christian Savard.

L’esprit de l’écoquartier réfère également à des bâtiments et des places publiques qui consomment peu d’eau et d’énergie. « C’est un milieu nettement écoresponsable, qui diminue ou évite le gaspillage des ressources naturelles. Un site qui, tous azimuts dans la dispense des besoins courants à ses habitants, établit un modèle de faible empreinte écologique », poursuit M. Savard.

Or, construire ces quartiers signifie implicitement de respecter les milieux naturels sur lesquels se posent ces villes d’avenir. « Aussi, il est recommandé de conserver les secteurs boisés ou, suivant cette impossibilité, de replanter des arbres et les végétaux autochtones que l’on a dû enlever pour la construction et l’aménagement de l’aire de vie des résidents. La planification d’un écoquartier exige également de repenser la nature et la superficie traditionnelles des commerces environnants, en privilégiant des magasins de vente au détail dispersés et de plus petites tailles, et en évitant les vastes aménagements de stationnements générateurs d’îlots de chaleur. L’imposition d’une logique marchande à échelle plus humaine parvient aussi à créer un meilleur sentiment d’appartenance communautaire, une recette à la base d’une écologie de marché cohérente », souligne-t-il.

Nouvelles générations

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Écoquartier Pointe-aux-Lièvres
© Vivre en Ville

Il existe quelques exemples d’écoquartiers en devenir au Québec. Des sites aménagés en fonction de ces recommandations. « On peut ainsi penser aux projets immobiliers de la Cité verte et de Pointe-aux-Lièvres, tous deux dans la région de la ville de Québec, ou au concept du Domaine Kogan à Rivière-du-Loup, des implantations dont la démarche est encadrée par les villes respectives. Objet d’une étude de faisabilité, un autre projet au descriptif sous embargo concerne un possible déploiement de cet acabit dans le centre-ville des Îles-de-la-Madeleine. Un site où toutes les possibilités sont sur la table commente Écohabitation, le mandataire désigné pour accompagner la municipalité. Ce sont des quartiers contraignants pour des constructeurs conventionnels », admet cependant Christian Savard.

En outre, une nouvelle génération de promoteurs, dans plusieurs cas de jeunes repreneurs de grandes firmes de construction existantes, s’emploie à donner vie à ce partage d’ambitions. Vivre en Ville croit néanmoins à l’importance de créer des incitatifs pour encourager les initiatives de développement et susciter le foisonnement de projets. Des mesures qui pourraient être liées à la lutte contre les changements climatiques, comme un Fonds d’aménagement d’urbanisme durable, pourraient donner lieu à des programmes gouvernementaux de soutien financier aux constructeurs et aux acheteurs. Ce serait une façon d’éponger le surcoût de construction qu’engendre la réalisation de ces milieux d’avant-garde, des espaces de vie au zénith de la réflexion sur tous les plans de l’ingénierie, plaide le porte-parole de l’OSBL qui cible un profond changement dans le mode de développement des collectivités.

L’exemple de Zibi

Jeff Westeinde, associé chez Theia Partners est le président du projet Zibi, un écoquartier en devenir, déjà primé dans ce créneau et récipiendaire du prix Construire 2019 dans la catégorie Construction durable. Première collectivité au pays à obtenir chaque année depuis sa fondation la certification One Planet Living, élaboré par Bioregional et le WWF-Fonds mondial pour la nature, cette collectivité verte qui s’élève judicieusement sur trois îles de la rivière des Outaouais, et sur les secteurs riverains des villes de Gatineau et Ottawa, représente l’archétype du développement urbain durable, la principale qualité d’un écoquartier.

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Jeff Westeinde, président du projet Zibi.
© Zibi

Le projet qui s’étendra à terme sur 34 acres accueillera plus de 5 000 résidents et offrira plus de 6 000 emplois.

Ce lieu unique comprendra des espaces commerciaux pour cibler l’achat domestique et des esplanades animées pour favoriser le divertissement près de chez soi. Cet environnement convivial comprendra enfin huit acres d’espaces verts riverains où résidents et visiteurs pourront s’évader en ville. On y trouvera des parcs et boisés assortis de sentiers et de végétaux aborigènes ainsi que des potagers communautaires où les chefs cultiveront leurs propres ingrédients et collaboreront avec des fournisseurs locaux.

Encourageant les déplacements à pied, à vélo ou en véhicules électriques offerts en libre-service, l’aire de vie sera composée de rues facilitant l’accès à des circuits de transport collectif et à une gare de train régional menant à d’harmonieuses connexions avec les villes environnantes.

Zéro déchet

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© Zibi

« Construit dans le décor idyllique d’un site industriel historique, voisin des chutes Chaudières, une source énergétique propre et patrimoniale, ce projet visionnaire de revitalisation est conçu pour attirer des citoyens de tous âges, des gens respectueux de l’environnement. Un esprit engageant d’équité naturelle et sociale qui est également incrusté dans les pratiques de construction des entrepreneurs et auquel adhèrent les promoteurs. À cet égard, la communauté accorde la priorité aux matériaux de construction à faible empreinte carbonique. Elle emploie des produits durables, locaux et récupérés, et évite ceux qui ont des répercussions environnementales néfastes », fait valoir Jeff Westeinde.

Aussi, l’écoquartier a été conçu en fonction d’une hiérarchie des déchets. « La priorité est la prévention des déchets, puis la réutilisation, le recyclage, le compostage et la récupération d’énergie. Ainsi, les rebuts de construction suivent une hiérarchie de réutilisation, de déconstruction et de démolition. Cela signifie que les déchets des bâtiments construits sont réutilisés dans la mesure du possible. Ces stratégies sont également mises en oeuvre pour aider les résidents à réduire leur consommation, par exemple en leur donnant accès à des biens, des appareils ménagers et des meubles issus du développement durable. »

Dans cette même veine, l’aménagement urbain de cet environnement primé prévient les inondations locales et la pollution des cours d’eau. « Nous prônons des pratiques exemplaires en matière de conservation, d’efficacité et de recyclage de l’eau. Afin de répondre à ces besoins, un système de gestion des eaux de surface a été déployé. Il a été adopté dans le but ultime de réutiliser l’eau sans générer de rebondissements environnementaux dommageables », indique M. Westeinde.

Projet carboneutre

« Nos ingénieurs ont aussi créé pour ce projet singulier le premier système intégré de climatisation et de chauffage de quartier de la région grâce à la réutilisation de déchets post-industriels en chaleur, l’énergie propre d’Hydro Ottawa et la rivière des Outaouais pour une prestation inégalée. »

« Dans cette optique, un réseau de distribution à basse température permettra aux édifices avec des charges thermiques différentes de partager l’énergie bien avant que le système ait besoin d’apport énergétique. Il offre ainsi un confort thermique pour l’ensemble de la communauté sans besoin de sources d’énergies hautes en carbone. Des sources primaires de chaleur proviennent des rejets thermiques engendrés par l’incinération des résidus de bois de l’usine de fabrication et de recyclage de papier Kruger située dans la région. La climatisation est tirée à même l’énergie renouvelable fournie par la rivière des Outaouais », relève le président du projet d’écoquartier Zibi.

 Un écoquartier n’est cependant pas l’apanage d’un quartier neuf, termine Christian Savard de Vivre en Ville. « Au contraire, plusieurs quartiers existants présentent de multiples qualités pour répondre aux enjeux des collectivités viables. Des quartiers centraux et des coeurs villageois qui ont parfois subi une déstructuration se prêtent adéquatement à la formation d’un nouveau tout cohérent de densification écoresponsable et de saine revitalisation patrimoniale. »